On a tous fait l’expérience de ce que Michael Crichton appelle l’amnésie de Gell-Mann (du nom du physicien prix Nobel Murray Gell-Mann, avec qui il a eu cette conversation).
C’est cette idée de « je crois tout ce que les médias racontent, sauf tout ce qui concerne les domaines où j’ai une certaine connaissance, sur lesquels ils ont toujours tort. »
Vous lisez un article sur un sujet que vous connaissez bien. Dans le cas de Murray, la physique ; dans le cas de Crichton, le show business. Vous lisez l’article et vous vous rendez compte que l’auteur n’a absolument rien compris, qu’il n’a aucune idée de ce dont il parle.
Parfois c’est tellement n’importe quoi que l’article présente le problème à l’envers, en inversant la cause et la conséquence. C’est ce que Crichton appelle les histoires où « les rues mouillées causent la pluie. »
Les médias sont remplis d’histoires comme ça.
Vous lisez avec exaspération ou amusement toutes ces conneries, et dès que vous tournez la page, vous oubliez tout. Vous passez aux articles sur la politique ou la finance, comme si les infos sur la Palestine ou le Brexit étaient plus justes que toutes les conneries que vous venez à peine de lire.
C’est un phénomène présent dans les médias, mais absent du reste de la vie quotidienne. Si quelqu’un exagère constamment ses histoires ou ne fait que raconter des conneries, vous allez vite arrêter de l’écouter. Même chose avec la justice : au tribunal, ils appliquent l’adage latin falsus in uno, falsus in omnibus (faux pour une chose, faux pour le tout). Quand un témoin ment sur un point particulier, l’ensemble de son témoignage devient irrecevable.
Si ce n’est pas acceptable pour la justice ou dans notre vie quotidienne, pourquoi on l’accepte dans les médias ?
La seule explication pour expliquer ce comportement, c’est cette forme d’amnésie décrite par Crichton. Où l’on se persuade que ça vaut quand même le coup de continuer à lire les autres articles. Mais la plupart des médias ne méritent pas la crédibilité qu’on leur accorde.
Ne perdez plus votre temps à lire / regarder / écouter les infos : concentrez-vous sur ce qui ne change pas.
Si quelque chose de vraiment important arrive, vous l’apprendrez d’une façon ou d’une autre par vos collègues ou votre famille. Sinon, c’est que ça ne valait pas vraiment le coup de le savoir.
Référence :
Michael Crichton – Why Speculate – http://larvatus.com/michael-crichton-why-speculate/
Moui
C’est assez vrai. Mais il faut lire quand même ce qui nous parait faux.
Car dans ce que j’ai lu d’archi-faux il y a parfois quelque chose qui me gène, surtout si je suis contre, qui me dérange, comme un petit caillou dans la chaussure.
Et puis à force qu’il m’irrite je fini par m’inquiéter de plus près pourquoi il me gène, parfois des années plus tard. Et en réfléchissant un peu, je découvre que ce n’est pas si c… que ça, mais que c’est un autre point de vue, très différent du mien, pas idiot au fond.
Alors je révise ma position, mes idées pré-conçues, mes jugements parcellaires, et j’y fais un logement plus ou moins grand au petit caillou. Ouaip j’évolue; et cela est possible grâce à nos contradicteurs.
Alors lisons. Tout ce que nous pouvons. Car hélas nous nous heurtons à la limite temporelle.
Belle journée. Que les méandres de votre pensée traversant vos circonvolutions cérébrales vous soient propices.
Je suis d’accord, il faut absolument pouvoir accepter les avis contraires. Il faudrait même idéalement activement les chercher.
Là, je parle vraiment de ce qui est faux, pas de ce qui est contraire à notre opinion. Et je parle surtout des infos, surtout pas des livres en général.
Je pense aussi que lire est très important, mais je conseillerai plutôt de ne pas lire tout ce que nous pouvons par contre.
Justement à cause de cette limite temporelle que vous évoquez, il ne faut pas perdre de temps à lire tout et n’importe quoi.
Comme pour la nourriture, « garbage in, garbage out. » Sauf qu’on voit difficilement les conséquences d’une lecture « malsaine » sur le cerveau. Un cerveau « gras » n’est pas aussi évident que 10 kgs pris autour de la ceinture.
Bonne journée à vous aussi !